Pleine Conscience et Stress

Stress est le mot à la mode aujourd’hui pour évoquer la tourmente de notre vie. Dans son usage populaire, ce mot est devenu un terme général connotant toutes les différentes pressions dont nous faisons l’expérience dans la vie ; stress professionnel, stress du temps, stress social. Par exemple, les autres peuvent être une grande source de stress dans notre vie.
Nous connaissons tous des moments où nous sentons que les autres contrôlent notre vie, que leurs demandes empiètent sur notre temps, qu’ils sont inhabituellement difficiles ou hostiles, ne font pas ce que nous attendons d’eux, ou ne s’inquiètent pas de nous ni de nos sentiments.

La réaction de notre corps au stress est souvent appelée « lutte ou fuite », parce qu’elle nous prépare soit à lutter, soit à fuir, devant le danger. Cette réaction est un passage rapide et automatique à la vitesse supérieure, qui peut être critique lorsque l’on est en danger physique. Cette réaction nous a permis de survivre en des temps plus primitifs où nous étions régulièrement confrontés à des situations menaçantes comme lutter ou fuir devant l’attaque d’un animal. Il est intéressant d’avoir cette capacité vitale. L’ennui survient lorsque nous ne sommes pas en mesure de la contrôler ou de l’utiliser de façon constructive, et qu’elle commence à nous contrôler.

Lorsque nous nous sentons menacés, cette réaction de « lutte ou de fuite » survient presqu’instantanément qui déclenche des réactions très vives au sein de notre  système nerveux.  Le résultat est un état d’hyperstimulation caractérisé par une forte tension des muscles et par de fortes émotions. En état de stress, nous pouvons nous sentir menacés, fâchés, irrités. Notre tension artérielle monte, notre cœur s’accélère, nos muscles sont tendus…

Aujourd’hui, généralement la plus grande partie de notre stress est générée par des menaces envers notre statut social et très rarement à l’encontre de notre vie. Tout ce qui menace notre sens du bien-être peut la déclencher. Si notre statut social est menacé, ou notre ego, ou nos croyances profondes, ou encore notre désir de contrôler les choses et de les voir se dérouler d’une certaine façon, notre système nerveux sonne le branle-bas de combat en vue d’une action défensive ou agressive.

La capacité de déclencher une réaction de lutte ou de fuite fait partie de notre nature et elle peut avoir d’importantes conséquences néfastes au niveau psychologique, social et physique si nous en perdons le contrôle. Pour ces raisons, si nous espérons inverser ce schéma de réactivité automatique au stress, il est important d’être conscient de cette tendance interne et de la facilité avec laquelle elle est déclenchée.

Alors que faisons-nous habituellement dans ces situations où la réaction fuite ou lutte monte en nous mais où nous nous sentons incapables de lutter ou de courir car l’une et l’autre de ces réactions sont socialement inacceptables ? Une façon habituelle de gérer la situation en société consiste à supprimer ces sensations le mieux que nous pouvons. Nous édifions un mur entre elles et nous ou nous les refoulons. Nous feignons de ne pas être agités. Nous cachons nos émotions aux autres et parfois à nous-mêmes. Nous inhibons les signes extérieurs de réactions au stress et poursuivons comme si de rien été, gardant en nous tout cela.

L’avantage de l’action lutte ou fuite c’est qu’après avoir affronté la situation stressante, nous nous sentons reposés. Alors, que lorsque nous intériorisons la réaction au stress, nous n’avons pas le relâchement qu’apportent la lutte ou la fuite. Nous gardons en nous-mêmes les hormones de stress qui causent des dégâts dans notre corps, et perturbent notre esprit sous la forme de pensées et d’émotions, qui s’agitent en nous.

Nous avons tous recours à des stratégies d’adaptation variées pour garder notre équilibre et faire face aux pressions de la vie. Nombreux sont ceux qui gèrent le stress de manière autodestructrice. Ces tentatives de contrôle sont appelées des stratégies dysfonctionnelles qui consistent à nier qu’il y ait le moindre problème. « Qui moi tendu ? Je ne suis pas tendu ». Pour d’autres, il faut du temps pour commencer à admettre qu’elles portent sur elle une cuirasse corporelle et qu’elles se sentent intérieurement blessées ou fâchées.

La stratégie du déni convient parfois temporairement pour faire face à des problèmes relativement peu importants, jusqu’à ce que vous ne puissiez plus les nier et il vous faut trouver autre chose.

Nous disposons de nombreuses autres façons néfastes pour contrôler notre stress. Elles sont néfastes précisément parce que, d’une façon ou d’une autre, elles évitent de percevoir et de gérer les vrais problèmes. L’addiction au travail est un exemple classique ; il est facile de vous immerger dans le travail. Certaines personnes se noient inconsciemment dans le travail car elles n’ont pas envie de faire face aux autres aspects de leur vie. Cela s’appelle un bénéfice caché. Etre activement engagé dans mille occupations est un autre comportement autodestructeur d’évitement. Pour gérer le stress et la détresse de leur vie, certains utilisent l’alcool, le tabac, la nourriture, les drogues illicites, les médicaments, pour simplement rendre leur vécu plus intéressant, plus plaisant ou moins lourd à endurer.

RÉPONDRE AU STRESS AU LIEU D’Y RÉAGIR

Le plus important pour se libérer de la réactivité au stress est d’être conscient de ce qui se passe dans la réalité au moment où cela se passe.

La réponse de stress est l’alternative à la réaction de stress. Elle représente la stratégie d’adaptation fonctionnelle, par opposition aux tentatives maladroites de gérer le stress de façon dysfonctionnelle.

Vous n’êtes pas obligé d’emprunter le chemin « Lutte ou fuite » chaque fois que vous êtes stressé. C’est ici qu’intervient la pleine conscience. Une vigilance d’instant en instant vous permet de garder le contrôle et d’influencer le flot des événements.

Par défaut, les réactions de stress se produisent de façon automatique et inconsciente. Dès que vous dirigez la conscience vers ce qui est entrain de se passer dans une situation stressante, vous avez déjà changé fortement la dite situation, rien qu’en cessant d’être inconscient ou en mode pilotage automatique. En augmentant votre niveau de présence, vous changez en fait la situation entière. Un tel changement intérieur vous donne une série d’options pour impacter sur ce qui va arriver ensuite. En fait, c’est le facteur qui décidera si vous prenez le chemin de la réaction au stress ou si vous allez prendre celui de la réponse au stress.

Si vous parvenez à rester centré dans ce moment de stress et à reconnaître à la fois le caractère stressant de la situation et votre impulsion à réagir, vous avez déjà introduit une nouvelle dimension dans la situation.

Pour éviter de perdre le contrôle, vous ne devez pas supprimer les pensées et les émotions qui surgissent associées à cette activation accrue. Vous pouvez en fait vous autoriser à vous sentir menacé, alarmé, fâché ou triste et à sentir les tensions dans votre corps à ce moment. Etant conscient dans l’instant présent, vous pouvez reconnaître ces phénomènes pour ce qu’ils sont, à savoir des pensées, des émotions et des sensations physiques.

La capacité de répondre en pleine conscience se développe chaque fois que nous faisons l’expérience de l’inconfort, de la douleur ou d’émotions fortes, que nous observons et travaillons à les laisser être là, tels qu’ils sont sans réagir. Nous faisons l’expérience d’un contrôle efficace provenant d’une acceptation. Nous constatons que nous n’avons pas à nous battre avec nos pensées ni avec nos émotions ou à forcer les choses à être comme nous voulons qu’elles soient.

Choisir d’emprunter la réponse de stress ne signifie pas que vous ne vous sentirez jamais menacé, alarmé ou triste, ni que vous ne ferez jamais rien de sot ou d’autodestructeur. Cela signifie que vous avez la possibilité d’être davantage conscient de vos impulsions.

Comment cultiver consciemment la réponse de stress dans la vie de tous les jours ? Quand monte la tendance de lutte ou de fuite, essayez de diriger votre attention vers votre visage et vos épaules qui se contractent, vers votre cœur qui commence à battre plus vite. Vers toutes les sensations que vous remarquez dans votre corps à cet instant. Voyez aussi si vous êtes conscient des sentiments de colère, de peur ou de tristesse tandis qu’ils montent en vous.  La pleine conscience vous prépare à une réponse appropriée. Si vous êtes prompt, vous pourrez parfois saisir la réaction avant qu’elle ne se développe tout à fait, et la transformer alors en une réponse de stress.

Si vous restez face au stress, vous augmentez sensiblement vos chances, à cet instant d’avoir conscience de l’ensemble de la situation. Percevoir les événements de cette façon vous permet de rester plus calme ou de retrouver plus rapidement votre équilibre intérieur.

Quand vous êtes ancrés dans le calme et dans l’ici et maintenant, vous êtes plus susceptible d’être créatif et de voir de nouvelles options, de trouver de nouvelles solutions aux problèmes. Vous êtes plus conscient de vos émotions et moins susceptible d’être emporté par elles. Vous conservez votre équilibre et votre capacité à prendre de la distance dans des circonstances difficiles.

Répondre en conscience au stress va réduite les tensions que nous laissons se bâtir en nous, réduisant par la même notre besoin de gérer l’inconfort qui accompagne les tensions intérieures.

Disposer d’une façon alternative de gérer la pression peut réduire la dépendance aux stratégies dysfonctionnelles habituelles auxquelles nous recourons si souvent.

Le fait de pouvoir apprendre à répondre au stress avec conscience ne signifie pas encore une fois que vous ne réagirez plus jamais ou que vous ne serez pas parfois submergé par vos sentiments. Quand nous répondons au stress, nous n’essayons pas de supprimer nos émotions. Nous apprenons plutôt à comment travailler avec toutes nos réactions, émotionnelles et physiques, de façon à pouvoir être moins contrôlé par elles et à voir comment nous pourrions répondre efficacement à la situation.

Observer vos émotions et les accepter, puis les laisser aller ne signifie pas que vous essayez de les annuler ou de vous en débarrasser. Cela signifie que vous savez ce dont vous êtes entrain de faire l’expérience. Cela signifie que quand vous posez une réponse vous le faite avec clarté et équilibre car vous n’êtes pas mené par une réactivité inconsciente. Vous agissez pour résoudre les problèmes plutôt que de les alourdir et causer du tort à vous-mêmes et aux autres.